La pandémie de Covid-19 et les confinements auront sans nul doute d’importantes conséquences au niveau des perspectives économiques, sociales et politiques à moyen et long terme, que nous mesurons encore mal.
Les partisans du « monde d’avant » s’opposent à ceux du « monde d’après », dans une quête plus ou moins partagée d’un futur souhaitable, faute de représentations claires ou pragmatiques.
La crise du Covid-19 a rendu encore plus manifeste la nécessité de déployer, au sein des organisations, une fonction de veille, d’anticipation et d’alerte afin de l’intégrer dans les processus décisionnels.
Comment développer des capacités d’anticipation et d’alerte permettant de mieux se préparer aux transformations de notre environnement, qu’elles soient lentes ou brutales ?
Comment développer des dispositifs de veille et de réflexion prospectives permettant d’articuler de façon cohérente court, moyen et long terme ?
La crise du Covid-19 a joué comme un accélérateur du temps. En quelques mois, pour certains secteurs, ce sont des années de gagnées : télétravail, télémédecine, téléenseignement, e-commerce, transports doux, logistique douce, recherche génétique, vaccins ARN messager, Union Européenne, conscience CO2, conscience environnementale, revenu universel, etc… Pour d’autres secteur se sont des réinventions comme la restauration par exemple avec les « dark kitchen » ou restaurants « fantômes » sans salle. Pour d’autres, la brutalité du changement économique a pu ruiner, provisoirement, tout espoir de lendemain. Stoppés net dans leur élan, Transports et Tourisme se réinventent déjà à grands pas.
De nombreuses organisations, adoptant des démarches prospectives, ont mis en place des dispositifs de veille, d’intelligence économique ou d’intelligence stratégique pour tenter de trouver la réponse la moins mauvaise et garder un temps d’avance face à leurs concurrents. Désormais en veille permanente, elles ont scruté les nouveautés techniques, numériques, les innovations sociales et ont tenté d’appréhender comment elles peuvent se mailler avec le « nouveau » monde. Il a s’agit d’agréger et de donner du sens à une variété d’information pertinentes qu’elles soient politiques, économiques, techniques, sociales, historiques, statistiques afin d’y déceler des signaux faibles, des points de bascules, des tendances et d’étayer des prises de décision.
En 2017, une étude prospective sur le commerce et la distribution proposait de réinventer le commerce de détail et la distribution. Pour bien comprendre l’intérêt, les préoccupations et les plans d’investissement des détaillants, Zebra a mené une étude internationale dans plusieurs segments du secteur : boutiques spécialisées, grands magasins, magasins de vêtements, supermarchés, chaînes d’électronique, de bricolage et de parapharmacie. Les conclusions de cette étude sont réunies dans un rapport prospectif 2017 sur le commerce de détail et la distribution. Entre autres scénarii, le rapport proposait de passer sur un modèle de « click & collect », projetant des chiffres pour 2021 qui ont déjà prouvé leur pertinence en 2020 :
Dans le secteur du Tourisme, s’inspirant de Airbnb et Amazon, Tierra Latina, agence de voyages française spécialiste de l’Amérique latine propose des activités en ligne à ses voyageurs afin de garder le lien avec eux, mais aussi entretenir leur passion pour le sous-continent en attendant de pouvoir à nouveau les y emmener. Au programme : cours de salsa, tango ou de cuisine en direct de Buenos Aires, visites à distance de Buenos Aires, Valparaiso, Cuzco, Santiago du Chili avec des guides francophones locaux, visites culturelles express. La crise du Covid-19 a ouvert la voie à l’émergence d’un tourisme à distance ou virtuel, imaginé pour pallier à l’impossibilité de se déplacer, mais qui est susceptible, post pandémie, de répondre à la fois aux nouvelles contraintes financières attendues (hausse des billets d’avion) et aux changements sociétaux projetés (« honte » de l’avion, nouveau tourisme culturel à distance).
Le travail de prospective en entreprise aboutit souvent au choix de scénarios de consensus.
Il n’est pas inutile de s’imposer un travail sur les scénarios inverses à commencer par les inverses des convictions que peut avoir une entreprise : opposer le tout libre au tout contrôlé, le tout environnemental au tout technologique, le tout psychologique au tout industriel, le tout local au tout mondial, etc. Tout cela dans le but de trouver matière à réflexion positive face à ces scénarios parfois impensables voire haïssables ou même qualifiés de pure science-fiction.
Comme l’a récemment écrit Philippe CAHEN, conférencier prospectiviste, auteur du livre « « Méthode & Pratiques de la prospective par les signaux faibles » : “Certainement qu’un militaire ou un scénariste a imaginé qu’un virus allait en moins d’un trimestre rendre malade des milliers ou millions de personnes, en tuer des milliers et finalement bloquer le monde. Bloquer les échanges et déplacements du monde alors que tout est flux, les personnes et les marchandises, par air, par bateaux, par la route. Tout est flux ne serait-ce que les près de deux milliards de touristes. Tout est bloqué. C’est donc possible, réalisé sous nos yeux à notre grande surprise.”
Alors pour 2021, pourquoi ne pas réfléchir à tous ces scénarios que l’on refuse de voir : panne d’électricité prolongée, rupture d’Internet (destruction massive de satellites), cyber attaque, forte hausse du pétrole, forte hausse de la température, pollution massive et prolongée, etc. Et surtout partager ensemble des recettes nouvelles ou remises au goût du jour pour mieux s’en prévenir car le principal risque pour une entreprise est de se faire surprendre.
Gina HERRY, Développement Commercial/Relation Banque – Le Village by CA Finistère